Cassons les "clichés" du métier de photographe !
Ne tournons pas autour du pot. Je m’excuse d’avance auprès des âmes sensibles... mais dans cette section, j’abandonne le politiquement correct !
Examinons donc le top 3 des phrases que nous autres photographes sommes amenés à entendre le plus souvent, et qui ont le don de m'agacer au plus haut point (et croyez-moi, je reste poli).
Photographe de métier ? Mais arrête, c’est facile !
T’as juste à appuyer sur un bouton, et en plus c’est du numérique !
Si tu la loupes, tu la refais. Et au pire, y a Photoshop !
En général, celui qui me dit ça, je lui prête mon reflex dans la foulée et lui demande de me faire une belle photo. Pas de loupé accepté ! Certains préfèrent dire "non" tout de suite. Tu m'étonnes... se retrouver avec un poids lourd dans les mains bardé de boutons aux termes et abréviations tous plus barbares les uns que les autres, ça intimide tout de suite !
Certains se risquent à en prendre une, parce qu’ils connaissent la photo et eux aussi ont un reflex (qu’ils utilisent trois fois par an, mais peu importe). Sauf que voilà, dans 99% des cas, la photo est loupée : elle est floue, ou mal cadrée, ou mal exposée… ou carrément les trois à la fois ! Elle est réussie dans de très rares cas, et quand elle l'est, elle se contente d’être techniquement bonne. Niveau émotion : zéro pointé. Et quand bien même l’image serait vraiment réussie en tous points, il me reste un joker pendant une prestation : « Superbe, j’avoue ! Bien joué ! Il ne te reste plus qu’à me remplacer. Je te cède ma place pour les 8 heures à venir ! »… C’est bizarre, mon appareil photo me revient dans les mains aussitôt avec un rire gêné… Moi pas comprendre.
Ensuite, Photoshop, malgré l’immensité des fonctionnalités disponibles et sa puissance, ce n’est pas non plus un faiseur de miracles ! Si j’essaye de rattraper une photo loupée, je vais plus perdre mon temps qu’autre chose. Une photo loupée, c’est une photo loupée, point. Quand vous cramez votre gâteau dans le four… bah il est cramé. Voilà.
Enfin, refaire une photo loupée est valable dans un contexte posé. Pendant un mariage ou une soirée événementielle, tout va vite, et si je loupe quelque chose, ce moment si fugace et unique... ne se reproduira pas. Ce genre de prestation est composée d’environ 90% de photos prises sur le vif. Donc heureusement que je ne me contente pas "d’appuyer sur un bouton", sinon je pense que mes clients voudraient me pendre haut et court !
Forcément que tu fais de belles photos...
t'as vu l'appareil que t'as, aussi ?
Ouais… c’est une de mes préférées celle-là !
Il m’est arrivé une fois d’emprunter l’appareil photo d’un invité lors d’un mariage et de prendre un cliché. La phrase qui est venue ensuite, je vous la donne en mille : « Oh génial ! Mais comment t’as fait ? ».
Vous connaissez tous le dicton : « La voiture ne fait pas le pilote » ? Eh bien, il peut s’appliquer à tout. Remplacez "la voiture" par "l’appareil photo" ; et "pilote" par "photographe"… je vous promets, ça marche aussi. Si, si !
N’oublions pas que l’appareil n’est jamais qu’un outil. Et si effectivement, avoir de bons outils permet d’avoir plus de facilité pour arriver à certains résultats, encore faut-il savoir s’en servir.
Il suffit de voir à quel point les smartphones sont aujourd’hui de plus en plus performants, on peut faire de somptueuses images avec ces petites bêtes (à tel point que certains photographes en ont fait leur "boîtier" principal) !
N’oublions pas que l’appareil n’est jamais qu’un outil. Et si effectivement, avoir de bons outils permet d’avoir plus de facilité pour arriver à certains résultats, encore faut-il savoir s’en servir. Et ça m’amène d’ailleurs à penser qu’il en ressort une erreur courante d’avoir cet état d’esprit : les personnes qui achètent sans savoir ce qu’ils achètent vraiment.
Se faire embobiner par un vendeur de grande surface, c’est arrivé à beaucoup d’entre nous. Et en suivant les conseils de ce bonhomme fort sympathique qui avait l’air de savoir de quoi il parlait, vous avez claqué 4500 sesterces (800 €, pardon) dans un reflex, alors que vous ne saviez même pas ce que signifie le mot "reflex"… et vous ne le savez toujours pas, d’ailleurs. Désolé si ça vous est arrivé, dites-vous que vous n’êtes pas le premier, et vous ne serez pas le dernier ! Oooooooh non !
Bref, tout ça pour dire : choisissez votre matériel en fonction de vos besoins et de vos attentes. Si vous débutez, acheter un reflex comme premier appareil n’est pas forcément indispensable. D’autant plus si c’est pour l’utiliser en mode "Tout Automatique" en permanence, ça n’a vraiment aucun intérêt. La qualité d’image qu’est capable de vous apporter un reflex ne sera absolument pas justifiée pour le prix que vous mettrez. Au final, vous aurez perdu beaucoup d’argent !
Un petit appareil de type bridge peut faire l’affaire dans bien des cas et pour bien des personnes ! Car en plus de dire au revoir au crédit supplémentaire au taux délirant dont vous n’aviez pas besoin, vous gagnerez en poids, en encombrement et en discrétion !
C’est-y pas beau ?
Un vrai photographe, ça ne retouche pas ses photos, d'abord !
Tu triches ! Je préfère les photos naturelles, moi !
Eeeeuuuuuuuuh… alors non. Déjà, pour commencer. Juste "non".
Ensuite… non.
Et enfin, non.
Toujours "non".
Voilà.
La retouche existe depuis aussi longtemps que le développement des photos. Donc, si vous me traitez de tricheur, vous insultez également tous les pionniers de l’argentique tels que Henri Cartier-Bresson. Faire un sépia ou un cyanotype à partir de procédés chimiques sur le papier, ça ne choquait personne à l’époque (un cyano-quoi ?). Le simple fait de choisir un type spécial de pellicule pour avoir un rendu particulier est du même accabit : plus granuleux, plus velouté, etc. Mais avec l’arrivée du numérique et de Photoshop, la retouche passe beaucoup moins bien. À se demander pourquoi : le processus est identique, seule la méthode change !
La retouche photo est un sujet qui divise beaucoup. Et pourtant, elle est omniprésente. Tout le monde s’est déjà extasié au moins une fois devant une magnifique photo de plage paradisiaque. À ce moment là, vous êtes-vous dit : « Ah oui mais bon, elle est retouchée ! ». Non, vous aviez juste envie d’aller aux Seychelles. C’est tout.
D’autre part, une photo "naturelle" au sens propre du terme, ça n’existe tout simplement pas. En réalité, la photo qui s’affiche sur votre écran (qu’il soit smartphone ou appareil photo) est déjà retouchée. Vous êtes soumis à la vision du constructeur, et chaque marque a sa "patte". Prenez donc plusieurs photos identiques avec des appareils différents, vous vous rendrez compte que le rendu n’est pas le même. Une vous paraîtra bien, tandis que les autres seront soit trop ternes, soit trop "poussées". Si vous allez fouiller dans les menus, vous trouverez peut-être même des réglages de saturation des couleurs ou de contraste. Et même sans parler de ça, quand vous activez le mode "portrait", "paysage" ou encore "sport", que croyez-vous qu’il se passe à l’intérieur de votre appareil ? Aaaaaah, retouche, quand tu nous tiens !
Et terminons par un argument qui met souvent tout le monde d’accord : à tous ceux qui disent préférer les photos naturelles (comprendre par "naturelles" : non retouchées et reflétant au mieux la réalité, donc), que pensez-vous des photos en noir et blanc ?? Nan parce que bon… ça n’a rien de très "naturel" au sens propre du terme… n’est-ce pas ? Alors, à moins que vous ne soyez un incorrigible mythomane, je pense que vous voyez le monde… en couleur. Voilà. Maintenant, poupougne.
Si vous me traitez de tricheur, vous insultez aussi tous les pionniers de l'argentique tels que Henri Cartier-Bresson.
Donc vous voyez, la retouche, ce n’est pas qu’enlever un grain de beauté ou amaigrir une silhouette jugée trop forte. Ce sont aussi de simples corrections comme des réglages d’exposition, de contraste, de saturation, etc. Et sachez enfin que la retouche permet même, dans certains cas, de justement se rapprocher au maximum de la réalité pour contourner les limites de nos appareils photos ! Et oui… et oui, mesdames et messieurs, même aujourd’hui en 2023, nos appareils ont des limites !
En photo de paysage par exemple, il est encore absolument impossible d’avoir en une seule prise un coucher de soleil tout en ayant du détail dans le reste du décor, tels que nous les voyons avec nos yeux. Bien souvent, la photo est un contre-jour : le ciel est bien exposé mais le reste de l’image est plongé dans l’ombre, faisant ainsi ce qu’on appelle des ombres chinoises. Et ça peut d’ailleurs être très joli !
Histoire de titiller les anti-retouches encore un peu, contre-jours et ombres chinoises sont des défauts tout ce qu’il y a d’artificiel. Vos yeux ne peuvent pas "voir" de contre-jour dans des conditions normales (à moins de les piéger volontairement en se cramant tous les nerfs optiques... ce que je vous déconseille fortement).
Bref, pour en revenir à nos moutons, savez-vous comment photographier un coucher de soleil sans avoir un effet de contre-jour, tout en ayant plein de détails au sol et dans le ciel ? Il faut prendre plusieurs photos à différentes expositions. Le positionnement doit évidemment être identique (photo sur trépied obligatoire). Ensuite, il faut lancer le logiciel de Satan : Photoshop, pour combiner toutes ces prises de vues et ne garder que le meilleur de chacune d’entre elles. Donc, vous voyez, la retouche peut parfois servir à des fins utiles !
Au final, c'est ça le pire : ce sont ceux qui ne font pas partie du métier et qui ne connaissent rien à la photo qui se permettent de vous faire ce genre de remarque !
Alors bien évidemment, ce procédé n’a absolument rien d’obligatoire, on peut parfaitement se contenter de travailler avec les limites de notre appareil et faire une photo différente de celle que nous avions pensé faire au départ... ce qui est au final une bien meilleure idée que d’être un anti-retouche à l’esprit étriqué.
Pour autant, chacun voit midi à sa porte. Je comprends parfaitement que certains ne souhaitent pas passer leurs photos dans un Lightroom ou un Photoshop. Mais je préfère 10 fois, 100 fois, 1000 fois entendre dire que la retouche n’est pas prévue, soit par manque de temps, d’envie ou de connaissances, plutôt que d’entendre une ânerie sans fondement. Parce qu’au final, c’est ça le pire : ce sont ceux qui ne font pas partie du métier et qui ne connaissent rien à la photo (ou qui pensent s’y connaître) qui se permettent de vous faire ce genre de remarque ! Personnellement, je ne néglige aucun des deux aspects, j’accorde autant d’importance à la prise de vue qu’à la retouche.
En revanche, certains photographes accordent plus d’importance à la retouche, et s’en servent comme cache-misère. Oui… mais non. Si vous faites une super retouche sur une image à la composition ratée, qui ne raconte aucune histoire ou qui a une émotion nulle, votre photo sera juste "bof". Désolé.
La retouche est avant tout une affaire de bon goût. Je pense que vous pouvez faire beaucoup de petites retouches sur une photo tant que vous n’allez pas trop loin avec les curseurs et que vous intervenez seulement là où c’est véritablement nécessaire. Je ne suis personnellement pas du tout fan de ces rendus HDR au look criard et remplis de halos lumineux, mais un traitement créatif bien dosé est tout aussi agréable à voir et peut même transcrire le style du photographe !
Imaginez. Enlevez vos œillères et ouvrez vos chakras. La retouche nous permet enfin d’affirmer notre style visuel comme jamais auparavant… alors, pourquoi s’en priver ? De mon point de vue, je me fiche totalement de savoir si je regarde une photo soit-disant naturelle ou pas. Ce que je veux, c’est voir une belle image, point. Et me demander comment l’artiste s’en est sorti pour me faire ressentir cette émotion, comment il a fait pour en arriver là, pour qu'à mon tour, je puisse le faire aussi.
Et enfin, last but not least : il faut savoir vivre avec son temps ! Non ?…
Si, hein. Bien.
J’espère que vous ne vous êtes pas sentis trop agressés par les propos que j’ai pu tenir sur cette page. Si vous me connaissiez, vous sauriez qu’ils sont tous dits sur le ton de l’humour (quoique).
En tout cas, malgré l’écriture un peu rude et franc du collier de cette section du site, vous avez eu le courage de lire jusqu’au bout, et ça, c’est super !
Et qui sait, peut-être que ma vision vous aura fait prendre conscience de certaines choses et que vous allez maintenant changer d’avis sur les sujets qui ont été abordés ici ?
Dans tous les cas, comme on dit : « Il n’y a que les cons qui ne changent pas d’avis ». Et comme rétorquerait notre ami Jean-Claude Van Damme : « Et moi, je n’ai pas changé pendant des années ! »
Quelle magnifique conclusion…
Mais au fait... maintenant que vous en savez plus sur ma façon de penser,
peut-être voudriez-vous découvrir avec quel matériel je travaille ?
Ou tout simplement en apprendre plus sur moi et mon histoire ?
Allez, il y a encore un peu de lecture... Courage !